Depuis le temps que Quentin Dupieux nous propose en moyenne un film par an, on commence à le connaître. Peut-être pas à le comprendre, ce serait encore prématuré. J'ai en tout cas appris à ne plus essayer de le comprendre, mais à simplement lui faire confiance. C'est ainsi que j'aborde l'expérience de ce film d'ouverture de Cannes 2024.
Fidèle à sa bande annonce, le film
met en scène quatre personnages, David et son ami Willy, à qui il essaye de "refiler" Florence qui lui tourne autour, au moment où celle ci lui présente son père Guillaume. Mais sont-ils vraiment ceux que l'on croit ? Avec ce ton irrévérencieux qu'on lui connait bien, Dupieux déforme la réalité et s'amuse avec le spectateur, proposant ainsi une réflexion sur le cinéma et les histoires qu'il raconte. Il prend un plaisir évident à déconstruire le cinéma et sa fabrication, se moquant doucement de ses artisans et de l'ego de ses acteurs.
Dans un geste audacieux, le réalisateur tend également un miroir à son époque et au politiquement correct, risquant de s'attirer quelques foudres. Enfin, il tourne en dérision l'angoisse de la montée en puissance de l'IA, affirmant à sa manière que rien n'est près de remplacer son bon vieux cerveau, qu'il ne manque d'ailleurs pas de remercier au générique.
Louis Garrel est particulièrement savoureux en ami angoissé, garant de la bienséance et prompt à la panique, face à Raphaël Quenard dont on ne se lasse toujours pas et Vincent Lindon et Léa Seydoux, qui semblent prendre un réel plaisir au jeu. Manuel Guillot s'impose également avec une interprétation que l'on ne risque pas d'oublier de sitôt. Chacun peut ici dévoiler une large palette de jeu, dans le cadre épuré de cette route de campagne et de ce restaurant isolé qui donne son nom au film.
Quentin Dupieux réussit encore l'exploit de tourner un long métrage simple et efficace en deux semaines, à y traiter de nombreux sujets brûlants avec le moins de filtres possibles, et surtout, à nous faire franchement rire.