Eadweard Muybridgeen, les prémices du cinéma racontés en BD


06 janvier 2025
En 1878, pour prouver qu'un cheval au galop a les quatre sabots en suspension, Eadweard Muybridge a été précurseur du cinéma !
Son histoire est sortie en BD

Un pionnier méconnu des débuts du cinéma

Le 23 octobre 2024 est sorti  Pour une fraction de seconde – La vie mouvementée d’Eadweard Muybridge, un récit biographique signé Guy Delisle. Cet album cartonné de 208 pages propose une fresque captivante qui retrace la vie et les innovations d’Eadweard Muybridge, souvent éclipsé par des figures comme Thomas Edison ou les frères Lumière. Pourtant, cet Anglais expatrié en Californie est le premier à capturer le mouvement sur pellicule, ouvrant la voie à l’invention du cinéma.

La photographie au service du mouvement

Eadweard Muybridge, né en 1830 à Kingston upon Thames, émigre en 1855 en Californie, où il s’intéresse à une technique naissante : la photographie. Bien qu’il n’ait au départ aucun attrait particulier pour les chevaux, il devient célèbre en collaborant avec Leland Stanford, magnat américain et passionné d’élevage équin. Leur objectif ? Répondre à une question débattue parmi les éleveurs de l’époque : un cheval au galop quitte-t-il complètement le sol ?

Grâce à une technique révolutionnaire pour l’époque – un dispositif d’appareils photographiques déclenchés en série – Muybridge capture en 1878 une séquence montrant clairement que, lors d’un galop, le cheval a les quatre sabots en suspension dans une position regroupée, et non en extension, comme les peintures le suggéraient. Cette prouesse technique a été réalisée à une vitesse de 1/1000ᵉ de seconde, une avancée majeure dans une époque où les temps d’exposition excédaient encore plusieurs secondes.

Une vie personnelle tumultueuse

Au-delà de ses exploits scientifiques, Eadweard Muybridge a mené une vie marquée par des événements rocambolesques. En 1874, il découvre que son épouse entretient une liaison et que son fils est en réalité issu de cette union adultère. Fou de rage, Muybridge abat l’amant de sa femme. Jugé en Californie, il est acquitté, bénéficiant de la sympathie d’un jury composé exclusivement d’hommes mariés.

Par ailleurs, un accident de diligence dans sa jeunesse, causant un traumatisme crânien, aurait influencé son comportement parfois impulsif et sa créativité débordante.

Des contributions majeures au cinéma et à la photographie

Les travaux de Muybridge ne se limitent pas à l’analyse du galop. À travers ses recherches sur le mouvement, il met en lumière les bases de la chronophotographie, une méthode qui inspire des inventeurs comme Étienne-Jules Marey, Thomas Edison, et même les frères Lumière. Ses séries d’images, qui montrent des actions fragmentées – un homme courant, une femme descendant un escalier – ont également influencé des peintres comme Edgar Degas et Auguste Rodin.

Aujourd’hui, l’impact de ses découvertes se fait encore ressentir dans la culture populaire. Par exemple, la fameuse scène de Matrix où Neo esquive une balle utilise une technique dérivée de celle inventée par Muybridge, avec des dizaines d’appareils photographiques placés en cercle pour capturer une action en temps réel.

Guy Delisle, un narrateur expérimenté

Connu pour ses récits graphiques tels que Chroniques birmanes ou Pyongyang, Guy Delisle adopte dans cet album un style épuré et direct qui met en lumière les multiples facettes de Muybridge. À travers des dialogues précis et un trait minimaliste, il réussit à transmettre la complexité de cet homme : un inventeur visionnaire, mais aussi un personnage tourmenté.

Une fresque historique et artistique

En retraçant la vie d’Eadweard Muybridge, ce récit illustre un moment clé de l’histoire de l’image : le passage de la peinture à la photographie, puis à l’image animée. Il explore également les débats techniques et esthétiques du XIXᵉ siècle, tout en questionnant la place des figures oubliées dans l’histoire du cinéma. aux éditionsDelcourt  

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© Éditions Delcourt, 2024 — Delisle