
Le 11 décembre 2024, le film Vingt Dieux de Louise Courvoisier fait son entrée en salles. Ce drame d'une durée de 1h30 nous transporte dans l’univers rural du Jura, en suivant les aventures de Totone, un jeune homme de 18 ans confronté à la réalité de la vie d'adulte. À travers ce récit, Louise Courvoisier capture les contours d'une jeunesse marquée par des choix de vie simples mais décisifs, dans un monde où l'amour, les liens familiaux et l'authenticité prédominent. David Marmier l'a rencontrée à l'occasion du festival Les Oeillades - 28e festival du film francophone d'Albi
Synopsis : Une histoire de famille, de travail et d'amour
Vingt Dieux suit Totone, incarné par Clément Favreau, un jeune homme dont les journées se partagent entre les bières, les bals et les courses de motocross avec ses amis. Mais la réalité va rapidement le rattraper : il doit désormais s'occuper de sa petite sœur Claire, âgée de 7 ans, et trouver un moyen de subvenir à leurs besoins. L'opportunité se présente sous la forme d'un projet ambitieux : fabriquer le meilleur comté de la région pour remporter la médaille d'or au concours agricole et, avec elle, une récompense de 30 000 euros.
Ce projet, à la fois une échappatoire et un véritable défi, entraîne le protagoniste dans une aventure où les relations humaines et le travail de la terre sont au centre du récit. Le film explore ainsi l’amour brut, celui de la famille, des amis et de la terre, dans une communauté qui préfère l’action à la parole.
Un portrait réaliste de la jeunesse rurale
Dans Vingt Dieux, Louise Courvoisier dresse un portrait authentique de la jeunesse rurale, ancrée dans un quotidien où l’entraide, la camaraderie et l'humour sont essentiels. Cette jeunesse, que la réalisatrice connaît bien (elle a grandi dans le Jura, à Cressia), fait face à la dureté de la vie, mais conserve une énergie de vivre presque palpable. Les scènes de courses de motocross, de stock-cars et les moments passés à rouler sur les départementales à toute allure capturent l’essence d’une génération pour laquelle les gestes sont plus significatifs que les mots.
Les personnages sont marqués par une simplicité de vie frappante. Ils s’expriment peu, mais leur lien avec la terre et les uns les autres est fort et sincère. Les scènes où Totone et ses amis se retrouvent au bal du village sont autant de moments où l’on perçoit les aspirations et les fragilités des protagonistes, souvent dissimulées sous un masque de force et de fierté.
Un casting de non-professionnels bluffant de vérité
L’un des atouts majeurs du film réside dans son casting. Pour interpréter ces personnages, Louise Courvoisier a fait appel à des acteurs non-professionnels, recrutés lors de castings sauvages dans des événements comme des courses de motocross ou des comices agricoles. Cette démarche a permis de recruter des jeunes issus de cet univers rural, qui apportent une authenticité inédite à l’écran.
Clément Favreau, dans le rôle de Totone, incarne un personnage impulsif et maladroit avec une grande justesse. Luna Garret, qui joue Claire, la petite sœur de Totone, apporte une grande énergie et une forme de sagesse étonnante pour son âge. Maïwène Barthelemy, quant à elle, interprète Marie-Lise, une jeune agricultrice indépendante et séduisante, dont la présence lumineuse contraste avec l’aspect rude de la vie quotidienne.
L’ensemble du casting, avec ses visages inconnus mais convaincants, réussit à créer une atmosphère de vérité et de proximité avec le spectateur et finalement à rendre le film encore plus immersif.
Des images lumineuses
Visuellement, Vingt Dieux séduit par sa direction artistique instinctive. Louise Courvoisier filme la ruralité avec une grande attention aux détails, dans des décors naturels qui semblent tout droit sortis de la vie quotidienne. L’utilisation des lumières, des couleurs et des paysages donne au film une texture presque tactile, où chaque scène semble vibrer d’authenticité.
Un exemple marquant de cette mise en scène se trouve dans la séquence où l’on observe la fabrication du comté. Les gestes précis des mains, la lente montée en température dans les chaudrons en cuivre, et la délicatesse du malaxage du caillé créent un spectacle captivant. L’attention portée à ces détails accentue l’aspect artisanal et intime du processus de fabrication du fromage, comme une métaphore du travail de la terre et de l’amour qui se tisse lentement, mais sûrement.
L'humour et la tendresse du quotidien
Bien que Vingt Dieux traite de sujets parfois durs et dramatiques, le film est également parsemé d'humour, notamment à travers les interactions entre les personnages. L’une des scènes les plus marquantes du film est celle où une expédition clandestine pour obtenir du lait frais prend un tour hilarant. Dans cet instant, qui mêle tendresse et burlesque, la réalisatrice réussit à offrir une pause dans le récit, en rappelant que la vie, malgré sa rudesse, est aussi faite de moments de légèreté.
À travers des scènes de la vie quotidienne, où les gens se retrouvent au bal ou à la fête, Louise Courvoisier révèle la beauté de la simplicité des relations humaines. C’est une jeunesse sans fard, où l’on vit pour l’instant, où les retrouvailles sont marquées par des gestes simples, mais lourds de sens.
Une ode à la vie paysanne
Vingt Dieux est un film sans artifice, qui révèle la beauté brute de la vie paysanne. Avec son humour, sa tendresse et ses personnages authentiques, il propose un regard sans détour sur une jeunesse rurale qui se bat pour ses rêves, ses proches et sa terre. Le film invite à redécouvrir la force du lien familial, de l’amitié et de l’amour dans un cadre simple mais bouleversant.
À la nuit des César 2025, Vingt Dieux a été déclaré Meilleur premier film et Révélation féminine pour Maïwène Barthelemy
Photographie: David Marmier pour la radio du cinema